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Femmes de Tech

Orlane Berlaud, Co-fondatrice et COO d’Arkange
Par David Abiker

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Co-fondatrice et COO d’Arkange, Orlane Berlaud accompagne les entreprises dans l’apprentissage de l’intelligence artificielle générative et la prise en main de nouveaux outils. Entre formation, stratégie et terrain, elle milite pour une IA qui libère les compétences plutôt qu’elle ne les remplace. Passionnée de transmission, elle s’engage aussi pour rendre ce secteur plus accessible, notamment aux femmes.
 

À quoi ressemble votre journée type et en quoi consiste votre rôle autour de la formation à l’IA ?

Je suis co-fondatrice d'Arkange, où j'occupe le rôle de Chief Operating Officer. Mon métier consiste à orchestrer l'ensemble des opérations de notre entreprise de conseil et formation en Intelligence Artificielle Générative. Concrètement, je coordonne toute la chaîne de valeur, de l'onboarding de nos consultants et formateurs jusqu'à l'optimisation continue de l'expérience client.

Ce qui rend mon rôle particulièrement stimulant, c'est cette double casquette la stratégie et l’opérationnel sur le terrain auprès des clients. Cette vision à 360 degrés me permet d'anticiper les besoins réels des entreprises et d'ajuster nos méthodes en temps réel. La beauté de mon métier réside précisément dans l'absence de routine. Certaines semaines, je suis en immersion totale avec nos clients, enchaînant plusieurs prestations : diagnostics IA, ateliers pratiques, accompagnement d'équipes sur le terrain. D'autres semaines sont dédiées à mes fonctions de COO, structurer nos processus, piloter la qualité, gérer notre certification Qualiopi, coordonner l'équipe. J'ai aussi des journées que j'appelle "build" où je co-construis avec Adrien et l'équipe les nouvelles offres, les nouveaux parcours d'accompagnement, nos agents IA internes.

On n'a jamais le temps de s'ennuyer, et chaque journée apporte son lot de défis stimulants et de solutions à inventer.


Qu'est-ce qui vous a amenée à l'IA et à une carrière dans la tech ?

J’ai toujours eu un profil technophile et ce depuis que je suis petite. Les nouvelles innovations m’ont toujours fascinée et je pense que travailler dans l’IA Générative était pour moi une révélation. L'IA générative représente pour moi la plus grande opportunité d'émancipation professionnelle depuis Internet. C'est une technologie qui démocratise l'accès à des capacités qui étaient autrefois réservées à quelques experts. Au fur et à mesure que je travaillais en entreprise, j'ai vu l'écart se creuser entre ceux qui maîtrisent ces outils et ceux qui en ont peur. C’est ainsi qu’avec Adrien, nous avons fondé Arkange.
 

À quoi ressemble une bonne formation IA aujourd'hui ?

Je suis convaincue qu’une grande partie d’une formation réussie se joue en amont. Nous décortiquons les cas d'usage métiers réels, pas des exemples génériques. Nos exercices s'inspirent de situations terrain que nous avons vécues. Nous limitons volontairement le nombre de participants pour garantir un suivi personnalisé, et nous alternons théorie, démonstration, atelier pratique.
Former à l'IA, c'est aussi former aux limites : biais, hallucinations, protection des données, enjeux éthiques. L'IA doit augmenter l'humain, pas le remplacer.


On parle beaucoup du "prompt engineering" : compétence durable ou effet de mode ?

A mon sens, c’est une compétence importante car nous pouvons considérablement améliorer les résultats en sachant poser les bonnes questions à une IA.
Toutefois, cela peut aussi être un effet de mode dans le sens où le terme "prompt engineering" tel qu'on l'entend aujourd'hui va probablement disparaître. Les modèles deviennent plus intuitifs, plus tolérants aux approximations.
Dans 3 ans, personne ne se vantera de savoir écrire un bon prompt, comme personne ne se vante aujourd'hui de savoir faire une bonne recherche sur Google. En fait il faut toujours comprendre les modèles et comment les exploiter au maximum, on est plus sur du context engineering que du prompt engineering.


Quel est le principal frein que vous observez dans les entreprises ?

Depuis que j’accompagne les entreprises, je constate plusieurs blocages récurrents. Le premier frein, et sans doute le plus puissant, reste la résistance au changement. Les équipes ont peur d'être remplacées par les machines, elles craignent que leurs compétences deviennent obsolètes. D'autres trouvent l'IA "trop compliquée" et s'autocensurent avant même d'essayer. Cette peur transforme ce qui devrait être perçu comme un outil en menace existentielle, créant des blocages psychologiques majeurs.

Ensuite, nous avons un écosystème qui bouge très vite ce qui peut donner place à des outils ou des cas d’usages qui deviendront obsolètes. Des outils surgissent, d'autres deviennent obsolètes en quelques mois, les cas d'usage se renouvellent constamment.

Il y a aussi un frein moins visible c’est le manque de temps et de méthodologie. Entre comprendre l'intérêt de l'IA et déployer concrètement des solutions opérationnelles, il y a un gouffre que les entreprises ne savent pas franchir seules. C'est précisément ce gap d'exécution que nous adressons chez Arkange, en proposant un accompagnement de bout en bout.


Comment l'IA peut-elle devenir une opportunité pour les femmes ?

Je pense sincèrement que c’est une chance de pouvoir voir plus de femmes dans le secteur de la tech. Pourquoi ? Parce que l'IA Générative démocratise l'accès à des compétences autrefois réservées aux profils très techniques. Et je dirais surtout que ce secteur a besoin de compétences que beaucoup de femmes ont développé au cours de leur carrière ; l’humain.
 

Pourquoi y a-t-il encore si peu de femmes dans la tech ? Et qu'est-ce qu'on peut faire concrètement ?

En fait, le problème est systémique et commence dès l'enfance. Dès le plus jeune âge, les filles intériorisent que la tech "c'est pour les garçons". Les stéréotypes de genre sont véhiculés par les jouets, les médias, parfois même par les enseignants sans qu'ils en aient conscience. Le résultat c’est que les femmes sous-estiment leurs compétences.

Il y a aussi un cercle vicieux de représentation. Parce qu'il y a peu de femmes dans la tech, les jeunes filles manquent de rôles modèles auxquels s'identifier. On ne peut pas devenir ce qu'on ne peut pas imaginer. Sans figures féminines inspirantes et visibles, comment se projeter dans ces carrières ?
Que faire concrètement ? Il faut agir sur plusieurs leviers simultanément. D'abord, mettre en lumière les femmes qui réussissent dans la tech, multiplier les témoignages, les portraits inspirants. Ensuite, intervenir dès l'école primaire et le collège pour déconstruire ces stéréotypes et présenter les métiers du numérique comme accessibles et passionnants pour tous.

À titre personnel, je m'engage auprès d'associations qui ont pour mission d’aller parler des métiers du numérique aux jeunes filles, montrer qu'elles y ont toute leur place, qu'elles peuvent y exceller. C'est un combat de long terme, mais essentiel. Et si je ne me trompe pas, Arkange est une entreprise d’IA en majorité féminine ! 😉


Un conseil à une jeune femme qui hésite à se lancer dans l'IA ?

Je dirais « N'attendez pas d'être experte pour commencer. Commencez pour devenir experte. ». Les compétences les plus recherchées dans l'IA aujourd'hui ne sont pas seulement techniques, ce sont des compétences de compréhension des besoins métiers, de traduction entre le business et la tech, de conduite du changement.
Restez décomplexées et ne vous laissez pas décourager par ceux qui essayent, même ceux qui jouent sur la légitimité des nouveaux acteurs, le temps nous laisse penser que ces mêmes gens ont la veste qui se retourne plutôt vite

Lancez-vous. Testez les outils, expérimentez sur vos propres cas d'usage professionnels. L'apprentissage par la pratique est cent fois plus efficace que l'accumulation théorique. Chaque entreprise, chaque secteur a besoin d'accompagnement IA. Votre expertise métier, quelle qu'elle soit, combinée à une montée en compétence IA, a une valeur considérable.

Et si vous venez d'un secteur complètement différent, c'est même un atout. Nous travaillons avec des typologies d'entreprises extrêmement variées, du tourisme à la comptabilité en passant par l'industrie. Votre double compétence métier + IA sera précisément ce qui fera la différence.
 

Une femme qui vous inspire aujourd'hui dans ce domaine ?

Il y a plein de femmes qui sont inspirantes dans ce domaine, mais si je devais choisir je dirais Caroline Chopinaud. Ce qui me fascine chez elle, c'est qu'elle ne reste pas dans la théorie et qu’elle rend tout échange super accessible. Elle est PARTOUT !
Elle structure concrètement l'écosystème français de l'IA, fait le pont entre recherche et entreprises, et travaille activement à démocratiser cette technologie auprès des PME et des territoires. Elle a aussi été désignée comme « Femme de Tech » par l’Académie des Technologies. Elle porte un discours engagé sur la place des femmes dans la tech et défend l'idée que l'IA peut devenir un véritable levier d'émancipation professionnelle pour les femmes.

 

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