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Femmes de Tech

Charlène Joanguy, Déléguée générale de Femmes@Numérique
par David Abiker

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Ancienne collaboratrice parlementaire passée par l’Elysée et femme d’engagement, Charlène Joanguy est aujourd’hui déléguée générale de Femmes@Numérique, la coalition qui milite pour une plus grande mixité dans les métiers du digital. Elle nous explique pourquoi la tech, plus qu’un secteur d’avenir, doit devenir un espace d’égalité, d’émancipation et de performance collective.
 

Vous venez du monde politique — vous avez été assistante parlementaire. Qu’est-ce qui vous a conduite à vous engager pour la cause des femmes dans le numérique ?

Disons que je suis revenue à mes premiers amours. J’ai commencé ma carrière dans le monde associatif et je suis restée fidèle à cet engagement depuis : cela fait plus de treize ans que j’agis pour l’égalité des chances et l’accès des jeunes à l’information sur leur orientation.
Mon parcours professionnel a toujours eu un fil conducteur : l’intérêt général. J’ai effectivement été attachée parlementaire, puis j’ai passé près de six ans à l’Élysée, où j’ai pu mesurer à quel point les décisions publiques peuvent transformer des vies — et combien le numérique est désormais au cœur de ces transformations.
Quand on parle d’emploi, d’éducation, de santé, d’écologie ou de souveraineté, le numérique est partout… mais les femmes y sont encore trop peu présentes.

Mon engagement pour Femmes@Numérique s’inscrit donc dans une continuité naturelle : celle de mes valeurs — égalité, éducation, inclusion — et de ma conviction que le numérique doit être un levier d’émancipation, pas un facteur d’exclusion.
 

Qu’avez-vous découvert en entrant dans cet univers ?

Ce que j’ai trouvé en rejoignant Femmes@Numérique, ce sont d’abord des femmes formidables, passionnées, engagées, qui veulent faire bouger les lignes concrètement.
Il y a une énergie incroyable et une conviction partagée : la mixité dans le numérique est l’affaire de tous.
C’est un sujet qui touche les entreprises, les institutions, l’école, le monde associatif — et bien sûr les femmes et les hommes de la tech.
Ma volonté, aujourd’hui, c’est que Femmes@Numérique soit cette voix fédératrice, capable de parler à tous les publics et de faire avancer ensemble une cause essentielle pour notre avenir collectif.
 

Votre parcours prouve qu’on peut contribuer à la tech sans être ingénieure. Est-ce un message que vous portez aussi aux jeunes femmes ?

Bien sûr ! La tech est un écosystème vaste, vivant, en perpétuelle évolution.
Sa richesse vient de la diversité des regards, des parcours et des approches. Mon rôle, c’est de porter cette diversité, d’incarner un engagement collectif, de bousculer les codes et d’empêcher que les inégalités d’hier se reproduisent dans le numérique de demain.
 

Dans votre rôle de déléguée générale, vous êtes à la croisée des mondes : institutions, entreprises, éducation. Comment se construit votre action au quotidien ?

Je veux que ces mondes se comprennent et se rejoignent. Notre mission, chez Femmes@Numérique, c’est de catalyser toutes les énergies qui convergent vers un même objectif : plus de mixité dans le numérique.
Ma feuille de route, c’est celle d’un chef d’orchestre : faire dialoguer, connecter, amplifier les initiatives.
Concrètement, cela veut dire :
  • Éduquer et attirer, pour éveiller les vocations dès le plus jeune âge ;
  • Inspirer et rayonner, pour donner envie et montrer que c’est possible ;
  • Fédérer et influencer, pour créer un mouvement collectif durable.


Si vous deviez résumer votre mission en une phrase ?

Faire de la mixité dans le numérique un véritable levier de croissance et de transformation pour notre société.
Permettre aux femmes de trouver leur place dans la tech n’est pas seulement une question d’égalité : c’est une condition de performance collective et de progrès durable.


Quels leviers sont les plus efficaces pour attirer les filles vers la tech : les modèles, l’école, les médias ?

Chez Femmes@Numérique, tout commence à l’école : là où se construisent les imaginaires et les ambitions.
Il faut agir dès le plus jeune âge, mais aussi auprès des prescripteurs — parents, enseignants — pour faire évoluer les représentations.
Les modèles jouent un rôle clé : voir des femmes réussir dans la tech rend ces métiers réels et accessibles.
Et les médias ont un rôle majeur à jouer, à condition de raconter les femmes de la tech comme on raconte les hommes : en montrant tous les parcours, toutes les réussites et toutes celles qui innovent au quotidien.
 

Le numérique souffre d’un déficit d’incarnation féminine. Quels rôles modèles vous inspirent le plus ?

Je pense à toutes ces femmes qui innovent, dirigent, forment, entreprennent dans la tech sans forcément chercher la lumière.
Les rôles modèles, ce sont autant les dirigeantes visibles que les cheffes de projet, formatrices ou développeuses : celles qui, par leur travail quotidien, donnent un nouveau visage à la tech.
 

Beaucoup de femmes quittent encore les carrières techniques en milieu de parcours. Comment les retenir ?

C’est un vrai sujet. Près d’une femme sur deux quitte le secteur avant 35 ans, souvent non par désintérêt mais par épuisement face à un environnement peu inclusif.
Les causes sont connues : micro-biais répétés, manque de reconnaissance, écarts de salaire persistants, sentiment d’isolement.
Pour les retenir, il faut agir sur la culture d’entreprise : politiques de progression transparentes, soutien à la parentalité, mentorat, formation continue et management inclusif.
Et surtout, considérer la mixité comme un enjeu de performance, pas comme un dossier RH. Là où les femmes restent, l’innovation est plus forte, la créativité plus grande et les équipes plus stables.
Autrement dit : quand on perd des talents féminins, on perd de la valeur collective.
 

Enfin, quel message adresseriez-vous à une jeune fille de 16 ans qui vous dit “la tech, ce n’est pas pour moi” ?

Je lui dirais que la tech n’est pas réservée à quelques profils : c’est un terrain immense où elle peut devenir codeuse, cheffe de projet, data analyste, designer — ou inventer un métier qui n’existe pas encore.
Derrière chaque innovation, il y a des gens qui veulent améliorer la vie des autres.
Et je suis certaine que ce qu’elle aime déjà faire peut trouver sa place dans le numérique.
Peu importe son parcours : envie, curiosité, créativité et audace suffisent pour avoir un impact.
La tech a besoin d’elle — et de toutes celles qui veulent construire le monde de demain.

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