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L'IA déclenche une nouvelle guerre des navigateurs qui va transformer le Web
par Georges Nahon

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L'IA générative est vite apparue à côté des navigateurs classiques comme une nouvelle page d'entrée dans le Web offrant nativement la fonction de moteur de recherche d'un nouveau genre qui ne recherche pas des sites mais livre des réponses déjà rédigées. Les nouveaux navigateurs IA vont même changer notre manière d’y accéder. Il ne s'agit pas moins que la redéfinition de la porte d'entrée d'Internet et de la façon dont on l'utilise.
 

La fusion du Web avec l'IA dès la porte d'entrée : la métamorphose du navigateur

Beaucoup de gens confondent encore leur navigateur avec Internet, et même la barre de recherche Google avec le navigateur lui-même. Il est vrai que les moteurs de recherche et les navigateurs forment un duo indissociable dans l'écosystème Web. Les résultats d'une recherche sur le Web s’affichent dans un navigateur. Si l’on veut maîtriser la recherche, il faut développer son propre navigateur. Google l'a compris et a créé Chrome pour cette raison. Les navigateurs sont nés avec les moteurs de recherche et ont peu évolué depuis. Avec l'IA est apparu le besoin de combiner dans un nouveau type de navigateur Web toutes les spécificités du dialogue avec les chatbots de l'IA comme ChatGPT, Le Chat, Gemini, Perplexity, Claude etc... 
En fusionnant l'IA directement avec les fonctions d'un navigateur, on supprime la nécessité d'utiliser des outils distincts, rendant l'internet plus efficace, fluide, personnalisé et plus accessible. 
En comprenant nos intentions le nouveau navigateur IA devient un assistant qui gère par lui-même la recherche d'informations, et il crée aussi des réponses, s'occupe des voyages, des commandes, des paiements, des emails et des rendez-vous. 

Aussi, les entreprises "IA natives", comme OpenAI, qui sont devenues de vrais moteurs de recherche IA avec leurs chatbots, développent leurs propres navigateurs IA pour remplacer leurs pages d'accueil actuelles sur le Web. Ce changement marque une transformation fondamentale de notre interaction avec les services d'intelligence artificielle. Il est incarné par des nouveaux navigateurs spécialisés qui redéfinissent la navigation Web. Ils offrent une expérience plus intuitive, axée sur les tâches. OpenAI devrait annoncer son navigateur et Perplexity qui a développé son propre navigateur Comet a fait une offre de rachat du navigateur Chrome de Google pour 34,5 mds $, ce qui souligne l'énorme intérêt pour passer du Web passif au Web agentique. Chrome a 5 milliards d'utilisateurs dans le monde et contrôle en juillet 2025 67,94% de part de marché des navigateurs web, suivi de Safari à 16,18% selon StateCounter. Google aurait pu être forcée de le vendre dans le cadre de son procès antitrust aux Etats-Unis. Mais le 2 septembre un juge fédéral a autorisé Google à garder le contrôle de Chrome.

On peut entrevoir un futur où la navigation classique sur le Web décline au profit d’une médiation par l’IA. Ce déplacement marque un changement de paradigme : l’utilisateur délègue la collecte et le traitement de l’information à des agents intelligents, plutôt que de parcourir lui-même les sites. 
 

Les agents intelligents dans les navigateurs IA transforment l'expérience Web

L’IA agentique redéfinit, avec ses agents intelligents, le rôle du navigateur : d’un simple lecteur de pages, il évolue en agent autonome, une interface dynamique capable d’interagir avec l’univers numérique au lieu de seulement l’afficher. Le Web n’est plus seulement parcouru, il est activement piloté.

Les navigateurs dopés à l’IA permettent aux agents d’observer, de raisonner et d’agir directement à l’intérieur des applications que les utilisateurs emploient déjà au quotidien comme le mail. Dans l'ère du "post Web" de l'IA, l'accès à l'information se fait de manière contextuelle immédiate et intégrée à notre environnement et à notre pensée. On ne saute plus entre onglets, apps, chatbots et les résultats de recherche. L'utilisateur posera ses questions directement à son navigateur IA, qui lui répondra par des réponses complètes synthétisées à partir de multiples sources, souvent sans que l'on ait besoin de visiter un seul site. Avec ces navigateurs, le Web cesse d’être un labyrinthe à explorer pour devenir un bureau intelligent, où l’information se présente d’elle-même en fonction du contexte et de l'historique mémorisé et où la complexité technique disparaît en coulisses. 

Mais si l'IA est capable de fournir une réponse sans générer de trafic monétisable vers la source d'origine, qu'adviendra-t-il des sites Web qui ont initialement créé ce contenu ?


Le Web ne s’écrira plus pour nous, mais pour les IA

Le Web est de plus en plus optimisé pour les modèles d’IA (LLMs) plutôt que pour les lecteurs humains. L’enjeu ne sera plus de grimper dans les classements des résultats des recherches par Google, mais de se rendre lisible, réutilisable et citable par des agents d’IA. Cela pourrait remodeler en profondeur la façon dont les contenus sont produits, structurés et mis en ligne mais également la structure cognitive et argumentative du Web lui-même. Ce n’est plus une personne humaine qui explorera le Web, mais son agent numérique, dialoguant avec un univers de contenus rédigés pour elle.
 

Confiance et Transparence : Le Paradoxe de la "Boîte Noire"

Coté confiance et transparence, les navigateurs IA filtrent et résument l'information à notre place, mais selon quels critères ? Cette boîte noire algorithmique pose une question importante : comment détecter les biais, erreurs, distorsions ou manipulations éventuelles quand l'IA décide ce que nous devons savoir ?
Le paradoxe est saisissant : nous faisons confiance aux résultats de l'IA précisément parce qu'elle nous semble puissante et objective, mais nous sommes incapables de vérifier cette objectivité car nous ignorons comment elle parvient à ses conclusions.
 

Navigateurs, moteurs de recherche et production de contenus : la nouvelle triple stratégie de l'IA

En plus de concurrencer les moteurs de recherche Web classiques et de déployer leurs propres navigateurs, les entreprises "IA native" produisent de plus en plus leurs propres contenus, souvent avec l'aide d'humains et d'autres IA. Elles le font principalement pour éviter les poursuites pour violation de droits d'auteur, mais aussi pour contrôler la qualité des données et réduire les biais. Cela leur permet également d'affiner leurs modèles sur des données hyper-spécifiques et d'utiliser des "données synthétiques" pour générer de nouvelles informations artificielles, ce qui leur donne un avantage concurrentiel majeur.
 

Les sociétés "IA natives" vont concurrencer les géants du Web par intégration verticale

Les "IA natives" développent une stratégie multifacette : navigateurs, moteurs de recherche, production de contenu propre (artificiel et fait par des humains) mais également réseaux sociaux et e-commerce par IA. Elles disposent de grandes ressources financières pour cela.

Avec leurs chatbots elles absorbent déjà d'énormes quantités de renseignements sur ce que les gens recherchent ou leurs préoccupations. Et avec leurs réseaux sociaux d'un nouveau type, elles vont maîtriser les données conversationnelles essentielles à l’entraînement des IA sans dépendre de Meta ni de X et vont offrir des expériences inédites échanges enrichis par l’IA, traductions instantanées, contenus générés sur mesure monétisées par abonnement plutôt que par la publicité.

Elles se positionnent aussi dans l'e-commerce en acceptant des demandes élaborées qui se font par conversation naturelle plutôt que par la consultation de catalogues ou en remplissant des formulaires. Elles comparent des articles sur plusieurs plateformes, gèrent des tâches complexes de manière autonome et conservent le contexte d’une session à l’autre. Les agents d’IA peuvent anticiper nos besoins avant même qu'on ne les perçoive. De plus, en exploitant nos agendas, nos données de santé, nos habitudes elles peuvent nous suggérer ou précommander des articles.

 

Conclusion: "AI is eating the Web."

"L'époque où nous "naviguions" sur le Web se termine : nous entrons dans l'ère de la "collecte" automatisée et intelligente d'informations." Avec un agent intelligent et proactif qui comprend nos intentions et agit de lui-même, sans attendre nos instructions.
Pour le moment les navigateurs IA créent un Web agentique qui cohabite avec le Web et les moteurs classiques. Ce qui donne un Web augmenté par l'IA.
Reste à voir si ces navigateurs IA réussiront à dépasser les habitudes d'usage bien ancrées de Google et du Web classique. 
La fusion progressive de l'IA et du Web semble inévitable et s'imposera. 
Sur internet personne ne saura qu'il s'adresse à une IA.

"On the Internet, nobody knows you’re an AI ". 


Ce dessin a été conçu entre Georges Nahon et Gemini de Google : c’est une adaptation générée par l’IA d’un dessin original du magazine américain NewYorker au début d’Internet.
Georges Nahon
Septembre 2025

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