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Le saviez-vous ?

Le défi à venir du rapport qualité/coût des services publics
par Gilbert Cette et Vincent Champain

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Il faut mesurer ce qui compte. Les politiques publiques sont pilotées par les moyens, et l’information sur leur valeur est limitée.

Depuis le dernier budget en équilibre en 1974, la dette publique a progressé, à plus de 115 % actuellement. Nous n’avons jamais ajusté nos ambitions à nos moyens : le rythme de croissance a été divisé par quatre depuis les années 1970, mais nos dépenses publiques n’ont pas ralenti aussi vite. Cela nous conduit à un niveau de prélèvements record en Europe sans que nous ayons atteint la même place en termes de qualité des services publics : l’éducation recule dans les classements internationaux, l’hôpital peine à absorber la demande, la justice est engorgée, la recherche décroche…

Nous endetter pour financer nos dépenses courantes revient à faire payer demain à nos enfants les services d’aujourd’hui, alors que les perspectives futures – démographiques, géopolitiques ou climatiques – inciteraient à la prudence. A moyen terme, cette trajectoire posera aussi un problème de soutenabilité. Nous devrons donc freiner le rythme de nos dépenses publiques.

Inefficacités. Ce faisant, nous risquons de dégrader les services publics essentiels – santé, éducation, sécurité – sans résoudre les inefficacités qui les alourdissent. Or, si la valeur des services pour nos concitoyens se dégrade plus vite que ses coûts ne baissent, nous serons perdants en termes de rapport qualité/coût. La redistribution passant en France par les politiques publiques plus que par l’impôt, cette dégradation touchera de façon disproportionnée les plus modestes et amplifiera la spirale dans laquelle est pris notre pays : plus de dégradation des services essentiels, plus de défiance, plus de difficulté à prendre les décisions favorables à la croissance ou l’efficacité publique et plus de dégradation des services publics…

On constate déjà ce cercle vicieux, par exemple dans la modération des rémunérations dans le secteur public, au point qu’on recrute des professeurs de math qui n’ont pas obtenu la moyenne dans cette matière, ou dans les délais pour obtenir un rendez-vous médical. Pourtant, il est possible de concilier une pression budgétaire croissante et un maintien, voire une progression, de la qualité des services essentiels, comme l’analyse le récent rapport de l’Observatoire du Long Terme.

D’abord, il faut mesurer ce qui compte. Les politiques publiques sont pilotées par les moyens, et l’information sur leur valeur est limitée. La mesure de la qualité des services essentiels doit être aussi précise que l’est la connaissance de leurs coûts. On doit mieux prioriser les nouvelles décisions, en généralisant les études d’impact des lois et des décisions de justice structurantes. Le temps perdu en formalités inutiles doit être rendu public et piloté.

Gouvernance. Ensuite, nous devons changer notre gouvernance. Notamment en assurant l’existence de diagnostics factuels non partisans sur les grandes priorités pour focaliser le débat sur les solutions plutôt que la contestation des faits. Il est nécessaire de mettre en place une programmation budgétaire pluriannuelle crédible et respectée, pour donner un cap aux agents publics et programmer les réformes dont l’échéance dépasse l’année. Il faut aussi mobiliser les agents publics avec une ambition d’excellence sur une offre mieux priorisée - on ne fournira pas un service de qualité avec des fonctionnaires démotivés.

Enfin, le PIB par habitant de la France est très inférieur à celui de nombreux pays (Allemagne, Pays-Bas, pays nordiques et scandinaves…), alors que nos dépenses publiques par habitant sont celles de ces pays. Le relèvement du PIB par habitant est la condition nécessaire du maintien d’un modèle social généreux.

L’urgence oblige la France à devoir ajuster à court terme ses finances publiques via une modération et parfois une baisse de la dépense et l’augmentation de certains prélèvements. Mais ces choix ne doivent pas être contradictoires avec le cap à suivre à moyen et long terme.

Gilbert Cette est professeur d’économie à NEOMA Business School. Vincent Champain est dirigeant d’entreprise et Président de l’Observatoire du Long Terme.

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